• Aux droits nationaux progressivement constitué depuis la fin du Moyen Age, il restait à franchir une étape pour acquérir leur physionomie actuelle : accomplir un processus d’unification, de rationalisation, de codification. Ultime étape qui a commencé dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et s’est poursuivie, amplifiée même, au cours du XIXe. Ces mutations ont été rapides, voire brutales. Aux évolutions lentes des périodes précédentes succèdent des révolutions. La Révolution française a joué, dans la gestation du droit nouveau, un rôle qui a été amplement souligné, voire exagéré.

    I)Les transformations révolutionnaires du droit

    La Révolution, au moins dans sa première phase qui s’achève avec la chute de Robespierre, le 9 thermidor an II, a été le temps de l’idéologie, de l’utopie. Transformations qui ont touché les sources : au pluralisme juridique a succédé un monisme radical, au moins en intention, reposant sur la loi ; mais aussi de nombreux domaines du droit privé et public, les principes d’organisation de l’Etat, mais aussi ceux de la famille, la propriété, les successions.

       1)Le règne de la loi

          a)Le légicentrisme révolutionnaire

    La Révolution a cultivé la nomophilie, l’amour de la loi, qu’elle a exaltée sans mesure. Elle a inventé le « législateur » anonyme et abstrait, censé traduire les volontés de l’ensemble du corps social, dont elle a consacré la suprématie dans ses Constitutions successives et dont l’œuvre a été érigée en source unique et exclusive du droit.

    La suprématie de la loi tient d’abord à celle de son auteur. L’instabilité politique de l’époque révolutionnaire a entrainé la succession rapide des régimes et des Constitutions, mais avec une constante : le respect formel du dogme désormais indiscuté de la séparation des pouvoirs, inspiré de Montesquieu mais mis en œuvre au profit exclusif du législatif. Face au législatif, l’exécutif, cantonné dans des fonctions subalternes d’application des lois et dépourvu d’un véritable pouvoir réglementaire, ne pouvait donc former un contrepoids efficace.

    La suprématie du pouvoir législatif impliquait l’omnipotence de la loi, fondée sur la souveraineté nationale. Elle n’avait donc à subir aucune des entraves qui avaient, dans le passé, freiné l’action législative du roi : la logique de l’esprit révolutionnaire menait au légicentrisme absolu. De fait, les Assemblées ont abondamment légiféré, non seulement en droit public mais aussi dans les domaines où n’entrait guère la législation royale , comme le droit privé, pour extirper les anciennes règles et créer un droit nouveau, fondement d’une société « régénérée ».


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique