•    A)Les quatre constitutions

    Le régime marxiste est plus récent en Chine qu'en URSS puisqu'il date de 1949. La Chine a connu depuis lors quatre constitutions. Après le programme commun de gouvernement, qui a servi de constitution provisoire à partir de 1949 au moment où le régime s'enracinait, une première constitution fut adoptée le 20 septembre 1954. Son inspiration, la structure de l'Etat et les mécanismes institutionnels la rapprochent de la constitution soviétique de 1936 : un parlement au rôle rendu symbolique par la création d'un comité permanent et un conseil de affaires de l'Etat, gouvernement étroitement soumis en droit à l'assemblée et à son comité. Deux originalités cependant, le parlement était monocaméral et à la tête du système étatique figurait un président de la république aux pouvoirs théoriques non négligeables. A la fin de la révolution culturelle, le 17 janvier 1975, une deuxième constitution fut votée. Symbole d'un retour au droit après l'anarchie des années précédentes, elle reprend le même schéma institutionnel, la présidence de la république, compromise par Liu Shaoqi, étant cependant supprimée. D'autre part, alors que le texte de 1954 mentionnait une seule fois le parti communiste, la nouvelle constitution consacrait sa suprématie et son rôle de direction à l'égard de l'Etat. Puis, au lendemain de la mort de Mao Zedong et de la prise de pouvoir par Hua Guofeng, une troisième constitution a été adoptée par l'assemblée populaire nationale le 5 mars 1978. Enfin, le 4 décembre 1982 a été votée la constitution actuelle. Si l'influence du modèle soviétique est encore considérable, la réalité chinoise et les conceptions théoriques des marxistes chinois marquent le régime de leur empreinte.

       B)Les principes

    La dictature du prolétariat n'est plus évoquée aujourd'hui en Chine, on parle enore parfois de "dictaure démocratique populaire" mais le plus souvent on caractérise la situation actuelle par la formule : "première phase du socialisme". La révolution culturelle avait été utilisée par Mao Zedong pour épurer le parti communiste, lutter contre l'embourgeoisement qui le menaçait, son sous-bassement était à la fois idéologique et tactique. Elle lui permettait en même temps de ressaisir un pouvoir qui lui échappait. Maintenant la primauté est donnée au développement de l'économie pour édifier "un socialisme aux couleurs de la Chine". Si, pour les gouvernants chinois, la lutte des classes continue d'exister, la réforme économique, l'ouverture sur l'étranger et la reconnaissance d'un secteur privé, l'emportent sur les préoccupations idéologiques. Etant entendu cependant que le parti contrôle étroitement le pouvoir politique. Un rôle dirigeant était attribué par la constitution de 1978 au parti communiste. Celui-ci est aujourd'hui "le noyau dirigeant du socialisme aux couleurs de la Chine" et "l'avant garde de la classe ouvrière chinoise, du peuple chinois et de la nation chinoise". A plusieurs reprises, la constitution réaffirmait ce rôle de direction : à propos de l'agriculture, du commerce, de l'économie, de la culture, de l'armée, des organisations d'Etat ou de masse. Le texte de 1982 ne reprend pas ces dispositions concernant le parti. Il y a là l'expression d'une volonté de séparer le parti communiste de l'Etat que les autorités hésitent à mettre en oeuvre. Dans la pratique le parti "conserve le monopole de l'action publique, administrative et idéologique. Seule l'économie lui échappe en partie" (Cabestan).

       C)Les institutions

    L'appareil du parti

    Le congrès est le parlement du parti. C'est un organe large, qui rassemblait 2 120 délégués lors du XVIe Congrès en novembre 2002. Il se réunit de façon irrégulière et ratifie en quelques jours les décisions que lui soumet le comité central. En temps de crise, on se garde de le convoquer. Une fois les difficultés surmontées, il est appelé par les vainqueurs de la lutte au sein du parti à légitimer leur pouvoir. Jamais un conflit ou un débat important n'a été arbité par lui. Le comité central, composé de 356 membres, exerce les attributions du congrès entre ses sessions. De lui dépendent des départements qui contrôlent la vie économique et politique. Le bureau politique se réunit une fois par mois. Particularité du système chinois, composé de neuf membres, le comité permanent du bureau politique est l'organe exécutif le plus important ; à la vérité, il constitue le centre du pouvoir exécutif au sein du parti, mais se réunit en fait assez rarement. Le secrétariat, formé de huit membres, dont deux siègent aussi au comité permanent. Il joue le rôle d'un organe de travail, d'un secrétariat administratif plus que d'un organe de décision, mais il supervise les départements du comité central.

    L'appareil de l'Etat

    L'assemblée populaire nationale (APN), chambre unique élue au suffrage universel indirect, comprend un peu moins de trois mille membres dont les 2/3 viennent du PC. C'est "l'organe suprême du pouvoir d'Etat". Suprématie toute théorique puisque l'assemblée se réunit chaque année pour une session de quelques jours où elle ratifie les décisions qui lui sont présentées. En principe, elle possède le pouvoir constituant et le pouvoir législatif, mais ce dernier est en pratique exercé par son comité permanent. Elu par l'APN, le comité permanent correspond, en plus réduit, au sovit suprême dans l'ex-URSS. Présidé par un premier ministre nommé pour 5 ans, le conseil des affaires de l'Etat (CAE) constitue le gouvernement de la Chine. C'est par le CAE que passe la mise en oeuvre des réformes dans les domaine économique en particulier. Si son autorité s'est accrue, il constitue encore aujourd'hui moins l'exécutif de l'APN, comme le prévoit la constitution, que le bras administratif du bureau politique et son comité permanent. La présidence de la république, fonction rétablie en 1982, est largement honorifique.

       D)Le refus du fédéralisme

    La Chine est un Etat unitaire, ce qui explique que son parlement soit monocaméral. La solution peut paraître surprenante dans une Etat composé de 56 nationalités, les non-han, c'est-à-dire les non-chinois (kazaks, tibétains, mongols, miao, hui...), occupant 60% du territoire. Leur chois se justifie tout d'abord par le fait que le fédéralisme a toujours été en Chine dans le passé une idée d'importation étrangère, destinée à démembrer ou affaiblir l'empire chinois. D'autre part, les minorités nationales, avec leurs 55 millions de personnes, ne représentent que moins de 5% du milliard trois cent trente huit millions d'habitants de la Chine. Enfin, et peut-être surtout, les minorités tiennent 90% des frontières chinoises, il est indispensable de les controler. Les autorités poursuivent une politique très active de colonisation en installant des immigrants han dans les zones de minorité, celles-ci se retrouvent submergées par les han. Ainsi en Mongolie, le rapport han/mongol sui était de 3/1 en 1947 était passé à 15/1 en 1971. La fin des régimes communistes européens incite à s'interroger sur lévolution de la Chine dans les années qui viennent.


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