•    c)Les règles communes

    Le délai commence à courir le lendemain de la prise de possession (le dies a quo ne compte pas) et se termine avec l’expiration du dernier jour (le dies a quem) même si c’est un jour férié. Les délais de prescription se comptent par jour (art. 2228).

    Le délai de prescription peut être interrompu dans trois hypothèses. Chaque fois, l’événement interruptif anéantit le délai déjà écoulé, de sorte que lorsque l’événement aura disparu c’est un nouveau délai qui recommencera à courir. Le délai de prescription est interrompu dans les cas suivants : par la perte de possession. Cette perte entraine interruption de la prescription immédiatement pour les meubles, et après un délai d’un an pour les immeubles (art. 2271) ; par une citation en justice que le vrai propriétaire fait signifier au possesseur (art. 2241) ; par la reconnaissance du droit du propriétaire par le possesseur (art. 2240).

    Le délai de prescription peut être suspendu dans certain cas. La survenance de l’événement entraine seulement un temps d’arrêt dans le délai. Le délai déjà accompli avant la suspension n’est pas anéanti ; mais il faudra le compléter après que l’événement suspensif aura disparu. L’incapacité du véritable propriétaire est une cause de suspension : selon l’article 2235, la prescription ne court pas contre les mineurs non émancipés et les majeurs en tutelle. Elle ne court pas non plus entre époux ou entre partenaires liés par un PACS. Enfin, la prescription ne court pas contre le propriétaire qui, par suite d’un événement de force majeure ou d’un empêchement résultant d’une convention, est dans l’impossibilité d’agir.

    Les effets de la prescription sont identiques, qu’elle soit trentenaire ou décennale. L’acquisition de la propriété est rétroactive. Par conséquent les actes passés par le possesseur pendant le délai d’usucapion se trouvent validés et le possesseur est rétroactivement propriétaire de tous les fruits perçus, même de mauvaise foi, au cours de ce délai. Mais la prescription n’opère pas de plein droit et le possesseur doit l’invoquer ; plus généralement, il peut y renoncer (art. 2250), expressément ou tacitement. A défaut du possesseur, ses créanciers peuvent cependant invoquer en son nom la prescription.

       2)L’acquisition instantanée des meubles

    La mobilité des meubles, leur difficile identification, et la rapidité des transactions en matière mobilière ont conduit à supprimer tout délai pour l’acquisition des meubles par le possesseur de bonne foi. Tel est le sens de la règle contenue dans l’article 2276 § 1 : « En fait de meubles, la possession vaut titre ». La règle fut posée par la jurisprudence au XVIIe et XVIIIe pour mettre fin aux difficultés soulevées par les revendications faites par le prétendu propriétaire.


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  • La propriété peut s’acquérir par possession, par occupation, par accession, ou par contrat. Il s’agit là de modes d’acquisition entre vifs. On les oppose aux modes d’acquisition à cause de mort (succession ab intestat et testamentaires), qui font l’objet d’une autre rubrique.

    I)Acquisition par la possession

       1)La prescription acquisitive ou usucapion

    L’usucapion est l’acquisition de la propriété ou de certains droits réels par la possession prolongée (art. 2258). Il existe deux sortes d’usucapion : la prescription trentenaire et la prescription décennale. Chacune d’entre elles est soumise à certaines règles. Mais il existe des règles communes.

       a)La prescription trentenaire

    Trois conditions sont exigées pour la prescription trentenaire. La chose doit être susceptible de possession, ce qui exclut les choses du domaine public, les choses communes et les monuments historiques. Mais peu importe qu’il s’agisse d’un meuble ou d’un immeuble.

    La possession ne doit pas être viciée. Un délai de possession de trente ans doit s’être écoulé depuis la prise de possession. Mais il n’est nécessaire que la même personne ait possédé le bien pendant trente ans. Le possesseur peut ajouter au temps qu’il a possédé lui-même, le temps pendant lequel son ou ses auteurs ont possédé.

       b)La prescription décennale

    Des conditions supplémentaires sont exigées. Seuls les immeubles peuvent être acquis par occupation décennale (art. 2265).

    Le possesseur doit être de bonne foi et avoir un juste titre. Le possesseur de bonne foi est celui qui croit avoir acquis la chose du véritable propriétaire. La bonne foi, qui est toujours présumée, doit avoir existé au moment de l’acquisition.

    Le juste titre est un acte juridique translatif de propriété à titre particulier (ex. : un contrat de vente, de donation…), exempt de toute cause de nullité absolue, mais inefficace. C’est un titre qui aurait pu transférer la propriété à lui seul s’il avait été valable. Malheureusement cela n’a pu se produire parce qu’il n’émanait pas du véritable propriétaire. (On appelle acquisition a non domino cette situation). Mais ce titre inefficace constitue alors le juste titre nécessaire pour bénéficier de l’usucapion abrégée. La possession doit avoir duré pendant un délai de dix ans.


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