•    A)Les premiers systèmes de retraites

    En France, les premiers systèmes de retraite ont été instaurés pour des catégories professionnelles particulières, liées à l'État : 1673 : les marins, 1831 : les militaires, 1853 : les fonctionnaires civils, 1894 : les mineurs, 1909 : les cheminots. L'histoire explique ainsi la concentration de régimes spéciaux dans le secteur public et nationalisé. Au cours du XIX° siècle, l’État n’est pas le seul employeur à développer des régimes de retraite. Dans le secteur privé, ces mesures ne concernent, toutefois, que les personnels qualifiés. Elles laissent de côté les plus mal rémunérés, dont la vieillesse est synonyme de misère. Avec l’industrialisation, les hommes rejoignent les villes. Sans le soutien de leur famille ni de leur village, leur subsistance repose sur la perception d’un salaire, souvent bas et aléatoire. Une grande pauvreté touche cette frange de la population, tout spécialement les personnes âgées. Les mouvements ouvriers s’organisent et les pouvoirs publics sont amenés à mettre en place des solutions collectives.

       B)La loi du 5 juillet 1910

    La loi du 5 juillet 1910 crée des rentes ouvrières et paysannes obligatoires  pour les salariés gagnant moins de 3 000 francs. Elle ne s’applique ni au-delà, ni aux travailleurs indépendants. Ce dispositif ne perdure pas, l’employeur n’ayant pas la possibilité d’imposer le précompte à ses salariés. La loi sur les « Retraites ouvrières et paysannes » (ROP) créé des systèmes de retraite par capitalisation à adhésion obligatoire, défendus par des membres du Parti Radical comme Léon Bourgeois et Paul Guieysse. Le projet est vivement combattu : par la droite et le patronat, qui dénoncent des charges inacceptables pour le pays et remettent en cause son principe même accusé d'encourager la paresse. par la CGT : le principal syndicat, dominé par les idées révolutionnaires (anarchistes), veut alors la destruction de l'État, et non voir son rôle étendu. Elle y voit, non sans raison, une «retraite pour les morts», quand l'âge de la retraite est fixé à 65 ans et que l'espérance de vie est inférieure à 50 ans. Le système de retraite par capitalisation est cependant pénalisé par les dépréciations monétaires de 1910 et de l'après-guerre dues à la politique inflationniste du gouvernement.

       C)Les assurances sociales

    Entre 1928 et 1930, un ensemble de lois instituent les assurances sociales pour les salariés de l’industrie et du commerce, sur le modèle du régime de retraite mis en place en Allemagne, par Bismark, dès 1889. L’Allemagne est le premier pays à instaurer des assurances sociales obligatoires, à l’initiative du chancelier Bismarck. Pour faire face aux syndicats et contrer la montée de l’opposition, celui-ci institutionnalise la protection sociale,provoquant ainsi la dissolution des nombreuses caisses de secours. L’assurance remplace l’assistance. Le système bismarckien repose sur plusieurs principes : La protection sociale est accordée en contrepartie d'une activité professionnelle, à ceux qui ont acquis des droits en échange de leur travail. Elle concerne les seuls salariés dont le salaire est inférieur à un certain montant, ne pouvant recourir à une couverture individuelle. La technique de l'assurance introduit une proportionnalité des cotisations par rapport aux salaires, et des prestations par rapport aux cotisations. Le système est géré par les employeurs et les salariés eux-mêmes.

       D)Les limites du système

    Ce système n'est pas sans limites : La vieillesse reste considérée comme un risque, au même titre que l'invalidité ou l'accident du travail. L'affiliation repose sur un critère de dépendance économique. Le système est destiné à lutter contre la pauvreté et ne concerne que les salariés du secteur privé non couverts par un régime spécial et dont les revenus ne dépassent pas un seuil donné : le plafond. Le principe est celui d'une capitalisation viagère : chaque assuré possède un compte individuel sur lequel sont portées cotisations et les rentes qu'elles produisent. Lorsqu'il atteint l'âge de la retraite (à partir de 60 ans), après 30 ans d'assurances, il peut choisir entre deux options : Le capital aliéné qui permet d'obtenir une rente servie jusqu'à sa mort. Le capital réservé qui donne droit à une rente plus faible mais réversible aux héritiers. L'érosion monétaire ne permet pas de préserver le pouvoir d'achat des retraités : ces difficultés financières conduisent assez vite à l'abandon du système de la capitalisation au profit de celui de la répartition, qui va permettre de verser rapidement des retraites aux personnes âgées. La loi du 14 mars 1941, qui crée la retraite des vieux travailleurs salariés (AVTS), va dans ce sens.


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