•       b)Les traditions romaines et chrétiennes

    Le droit public impérial n’a pas disparu avec les invasions. Sa survie a été assurée par l’aristocratie gallo-romaine, qui avait conservé son influence et ses fonctions, et par l’Eglise, qui avait adopté, en la christianisant, la tradition romaine et en assurait la transmission auprès des rois francs. L’administration impériale et ses pratiques ont été en grande partie conservées. Les comtes, représentants locaux du roi, furent établis dans le cadre des anciennes cités ou pagi. Les rois francs portaient des titres romains et arboraient les insignes distinctifs de ces fonctions.

    La romanisation de la monarchie franque a été favorisée par la conversion et le baptême de Clovis, à la Noël 496 selon la tradition, plus vraisemblablement en 499 selon des recherches récentes. Initiative qui n’était certainement pas inspirée par des calculs politiques mais a néanmoins produit des conséquences importantes, en ralliant à Clovis et à ses successeurs les populations et le clergé de toute la Gaule. Elle a fait des rois francs, jusque dans le domaine religieux, les successeurs de Constantin et des empereurs romains chrétiens.

    Le lien entre monarchie franque et tradition romano-chrétienne s’est renforcé avec le changement dynastique de 751 et l’avènement des carolingiens. Approuvé par l’Eglise, cet évènement s’est accompagné d’un renouveau intellectuel animé par les grands ecclésiastiques, la renaissance carolingienne, fondée à la fois sur l’essor des études bibliques et sur le retour à la culture antique. L’introduction du sacre royal a constitué la première manifestation politique de cette renaissance. Il faisait du roi un magistrat au service d’une respublica christianisée.

    Sa signification était d’abord religieuse : il scellait une nouvelle alliance entre Dieu et le peuple franc, et faisait de son roi, l’élu de Dieu, son représentant terrestre, dans un régime politique d’inspiration théocratique. Indirectement, il contribuait aussi à conforter les conceptions politiques romaines : il accentuait la sacralisation du souverain, le caractère mi-laïc, mi-religieux que présentaient déjà les empereurs chrétiens ; à l’opposé de la patrimonialité, il insistait sur l’idée que la royauté n’était pas le bien personnel du roi mais une fonction publique.

    L’influence romanisante a culminé avec la restauration de l’Empire. Le jour de Noël de l’an 800, Charlemagne, roi des francs depuis 774, fut couronné empereur par le pape Léon III en la basilique Saint-Pierre de Rome. Pour les contemporains lettrés, il signifiait la restauration de l’Empire D’occident, disparu depuis 476, la renovatio imperii à laquelle l’Empire d’Orient, politiquement affaibli, ne pouvait s’opposer. On peut cependant douter de la profondeur de la restauration impériale, et plus généralement de la restauration carolingienne, en constatant leur impuissance à infléchir la tradition des partages successoraux du royaume.


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