•    1)Une superposition de textes

    A partir de la création de l'Union européenne par le traité de Maastricht, les dispositions de la convention d'application Shengen ont rapidement fait double emploi avec les textes adoptés dans le cadre du 3e pilier de l'Union (anciennement coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures), voir dans le cadre communautaire (pour les visas de court séjour). Il s'en est suivi une superposition de textes. Tel est le cas des règles pour les visas de court séjour, la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, la coopération policière et judiciaire ou même pour les systèmes d'information. Cette concurrence était appelée à s'accroitre compte tenu de la communautarisation, opérée par le traité d'Amsterdam, de certaines questions qui relevaient de la coopération intergouvernementale. Les deux systèmes ont en effet tous deux pour objet de créer un espace de liberté, de sécurité et de justice, en traitant des questions telles que la libre circulation des personnes, l'asile, l'immigration, la coopération policière et judiciaire en matière répressive. Par ailleurs, des critiques pouvaient être avancées à l'encontre de la coopération Shengen, comme la superposition inutile d'instances intergouvernementales et de groupes de travail aux institutions de l'Union européenne et surtout l'absence de contrôle démocratique et juridictionnel direct. Pour mettre fin à ce système parallèle, un protocole annexé au traité d'Amsterdam a prévu d'intégrer l'acquis Shengen dans le cadre de l'Union européenne, dans la mesure où ses dispositions ne sont pas incompatibles avec le droit de l'Union européenne et le droit communautaire.

       2)La coopération Shengen

    Techniquement, la coopération Shengen est une coopération renforcée, conduite par un nombre restreint d'Etats membres dans le cadre juridique et institutionnel de l'Union européenne. Cette méthode présente en effet certains avantages : dans la mesure où l'espace Shengen conserve des spécificités qui ne se retrouvent pas dans le cadre de l'Union européenne at qui mettront peut-être du temps à trouver leur réalisation concrète en son sein (par exemple, le droit d'observation et de poursuite transfrontière), la coopération renforcée permet d'éviter un retour en arrière pour les Etats de l'espace Shengen et la remise en cause d'un système durement acquis ; la coopération renforcée permet non seulement d'intégrer l'acquis mais également de le développeren ayant recours aux actes juridiques, organes et procédures de l'Union européenne. Les Etats participants pourront appofondir la coopération plus étroite instaurée entre eux. Sa mise en oeuvre se révélera toutefois assez complexe, compte tenu notamment de la répartition des questions entre le cadre communautaire (visas, asile, immigration et autres polititiques liés à la libre circulation des personnes) et le 3e pilier (coopération policière et judiciaire en matière pénale), du fait que le Danemark (qui participe à l'espace Shengen) n'applique pas les règles du Titre IV du traité CE, ou encore de la nécessité d'intégrer à la prise de décision la Norvège et l'Islande, membres associés de l'espace Shengen ; enfin, cette coopération n'est pas un cercle fermé mais est ouverte à la participation des autres Etats membres de l'Union. Toutefois, par dérogation au shéma général prévu pour une coopération renforcée dans le cadre du 3e pilier de l'Union, le conseil statue sur les demandes de participation à l'unanimité. Le conseil a ainsi accepté les demandes du Royaume-Uni et de l'Irlande de participer à certaines dispositions de l'acquis Shengen.

       3)Le troisième pilier

    L'Union européenne a été instituée par le Traité de Maastricht, signé le 7 février 1992 et entré en vigueur le 1er novembre 1993, qui va donner à cette communauté de quinze Etats (dès 1995) une nouvelle dimension politique. L'Union européenne repose sur ces trois piliers qui se différencient par leurs procédures de décisions ainsi que par le rôle qu'y jouent les institutions communautaires. Un premier pilier, le principal, réunit l'ensemble des politiques communes (notamment la Politique Agricole Commune, la politique monétaire, la politique des transports ou la politique commerciale commune). Au titre de ces politiques, les Institutions jouent pleinement leur rôle et les procédures communautaires de prise de décision s'appliquent. Concernant tous les thèmes qui ne sont pas encore communautarisés, ils sont inclus dans les deux autres piliers qui abordent par une approche intergouvernementale les domaines tels que la Politique Etrangère et de Sécurité Commune ou la coopération dans les domaines de la justice ou des affaires intérieures. Ce troisième pilier institué par le Traité de Maastricht et modifié par le Traité d'Amsterdam instaure une coopération intergouvernementale entre les Etats membres de l'UE dans le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale principalement la lutte contre la fraude internationale (trafic de drogue, terrorisme…), l'harmonisation du droit pénal et la coopération entre les polices. Ici, les décisions sont prises par les ministres de l'Intérieur et de la Justice réunis en Conseil de l'Union européenne. Depuis le traité d’Amsterdam, les questions relatives à la politique des visas, de l’asile,de l’immigration et autres politiques liées à la libre circulation des personnes (ce qui comprend aussi la coopération judiciaire en matière civile), ont été transférées au sein du nouveau titre IV du traité sur la Communauté européenne. Les bases juridiques d’un espace de liberté, de sécurité et de justice sontainsi réparties entre les deux piliers. De plus, une passerelle est inscrite dans le troisième pilier permettant aux États membres de transférer des domaines du titre VI TUE (troisième pilier) vers le titre IV (premier pilier).

       4)L’acquis de Shengen

    L'intégration de l'acquis Shengen au sein de L'Union européenne comporte plusieurs aspects : Dès l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, soit le 1er mai 1999, l'acquis de Shengen (l'accord du 14 juin 1985, la convention d'application du 19 juin 1990, les protocoles et accords d'adhésion, les décisions et déclarations adoptées par le comité exécutif Shengen et les actes adoptés par les instances auxquelles le comité exécutif a conféré des pouvoirs de décision) a été intégré dans le 3e pilier de l'Union européenne et s'est appliqué immédiatement aux Etats membres concernés. Le droit issu de la coopération Shengen est devenue partie intégrante de l'acquis de l'Union européenne avec un rang de droit dérivé et, comme tel, doit être intégralement accepté par tous les Etats candidats à l'adhésion ; désormais, la coopération est conduite dans le cadre juridique et institutionnel de l'Union européenne. le conseil des ministres s'est substitué au comité exécutif et le secrétariat Shengen a été intégré au secrétariat général du conseil ; le conseil, par une décision du 20 mai 1999, a déterminé la base juridique des dispositions et décisions qui constituent l'acquis de Shengen, c'est-à-dire soit le cadre communautaire (visas, asile, immigration, libre circulation des personnes), soit le 3e pilier (coopération policière et judiciaire en matière pénale) ; enfin, s'agissant des rapports entre la convention d'application de l'accord de Shengen et le droit communautaire, l'article 134 de la convention d'application et le protocole de Shengen élaboré dans le cadre du traité d'Amsterdam précisent que l'acquis de Shengen n'est applicable que pour autant qu'il est compatible avec le droit communautaire.


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