• La renaissance des XIIe et XIIIe siècles
     
    La diffusion du droit romain
     
    L’école des glossateurs
     
    Les circonstances dans lesquelles ont été retrouvées les compilations de Justinien restent obscures. A la fin du XIe siècle et au tout début du XIIe siècle est apparu à  Bologne un enseignement régulier qui devait donner naissance à la première université de droit. Dès la fin du XIe siècle a commencé à se constituer un premier grand courant doctrinal, celui des glossateurs, dont le précurseur fut le bolonais Irnerius. La méthode des glossateurs traduit l’intense vénération vouée au droit romain. Les glossateurs mirent en œuvre une méthode fondée sur l’exégèse, sur la lecture et l’examen approfondis des lois romaines, qu’ils disséquaient soigneusement et dont ils donnaient, en interligne et en marge des manuscrits, de brefs commentaires littéraux, ou gloses, pour définir les termes importants ou obscurs et en exposer la signification. Un travail de classement et de synthèses fut réalisé par François Accurse : la grande glose d’Accurse.
     
    Les universités françaises 
     
    A partir de l’Italie, l’étude du droit romain s’est diffusée, au cours du XIIe siècle, en Provence, en Languedoc et en Catalogne. Au XIIIe siècle, de véritables universités naissent en France, à Toulouse en 1229, à Montpellier, fondée officiellement en 1289, et surtout à Orléans. L’enseignement du droit romain, interdit à Paris par une décrétale du pape Honorius III de 1219, non en raison de l’hostilité du roi à son égard mais pour protéger les études de théologie dont Paris était le grand centre européen, se transporta à Orléans, autre ville du domaine royal. Autorisé par le pape en 1235, il y connut un essor
    rapide consacré, en 1309, par la constitution officielle d’une université qui devait rester jusqu’au XVIIe siècle la première de France pour l’étude du droit et jouir d’une renommée internationale. Au XIVe-XVe siècle furent fondées de nouvelles facultés de droit en Italie (Pavie, Padoue), en France (Avignon, Angers, Caen, Poitiers, Cahors, Bordeaux, Bourges, Nantes), en Espagne, puis dans l’Europe du nord et de l’est.
     
    L’école des post glossateurs 
     
    La méthode des glossateurs devait pourtant être dépasser. Dans la seconde moitié du XIIIe siècle, de nouveaux procédés d’analyse inspirés de la dialectique d’Aristote furent expérimentés à Orléans où enseignaient de grands juristes : Jacques de Révigny, Pierre de Belleperche. Dans la seconde moitié du XIIIe siècle, les post-glossateurs orléanais ont été les premiers à abandonner la glose au profit de commentaires plus développés et moins littéraux. Les enseignants de la doctrine orléanaise ont été repris et développés au XIVe siècle par les juristes italiens : d’abord Cynus de Pistoie et surtout Bartole qui exerça une très forte influence et passe pour le fondateur d’un courant doctrinal nouveau
    celui des bartolistes, commentateurs qui devait dominer la science juridique européenne jusqu’au milieu du XVIe siècle. Les bartolistes ont considérablement accru le rôle de la doctrine au détriment de l’attachement au texte des lois.  
     
    La réception du droit romain
     
    Les réactions européennes
     
    le droit romain redécouvert domine dans la procédure juridique de la plupart des pays européens. Ce système juridique, qui est répandu dans toute l'Europe continentale (ainsi que l'Écosse) est connu sous le nom de iuris commune. Seule l'Angleterre est très peu influencée par le droit romain. Ainsi, le système anglais de Common law se développe. L’Empereur du Saint empire romain germanique prétend assurer  la  continuité  avec  les  Empereurs  romains,  pouvoir  ainsi  appliquer  le  droit  de  Justinien  dans  l’ensemble  de l’Empire, et, surtout, émettre de nouvelles constitutions intégrant très légitimement le  Code et  s’appliquant  à  l’ensemble de  l’ancien  Empire,  France  incluse, entre autres. Pour  ce  faire,  l’Empereur  s’est  entouré  de  légistes. Mais les royaumes européens ont
    l’assujettissement au Saint empire romain germanique et donc au droit romain qui dans ces royaumes était une norme supplétive aux règles juridiques internes.     
     
    Les réactions françaises
     
    La monarchie française a compris très vite tous les avantages qu’elle pouvait tirer du droit romain pour moderniser le système judiciaire, remise en vigueur de la procédure du bas empire et renaissance des professions juridiques, mais la monarchie ne veut pas l’imposer aux populations. Dans le Midi déjà fortement romanisé,le droit romain s’impose peu à peu comme le nouveau fondement de l’ordre juridique ; ces régions accueillent et assimilent rapidement l’héritage apporté par la redécouverte intellectuelle  du XIIe siècle ; les praticiens utilisent le droit romain dans leurs actes : ils s’en inspirent
    beaucoup et n’hésitent pas à s’en prévaloir dans leurs argumentations ou dans leurs décisions. La situation est très différente dans le Nord de la France : dans ladite zone, peu d’influence du droit romain sur les actes de la pratique qui continuent à être essentiellement régis par un droit d’origine coutumière ; la distinction entre « pays de coutumes » et « pays de droit écrit » commence à se cristalliser. La frontière entre ces deux zones va de la Rochelle à Genève et coupe l’Auvergne en deux.
    Droit romain et souveraineté  
     
    La formation de l’Etat a commencé au XIIIe siècle. La reconstruction du pouvoir royal s’est fait sur la base du droit féodal puis sur la base du droit romain. La royauté utilise, surtout à partir de Philippe Auguste, le droit féodal, en affirmant le principe de la suzeraineté royale, le roi seul au-dessus de tous , tandis que ses vassaux lui doivent serment de fidélité. En cas d'annexion de fief, tous les arrière-vassaux tombent ainsi sous la domination royale. La formation de la notion de souveraineté est la conséquence directe de la renaissance du droit romain. Selon une formule composé en 1256, « le roi
    est princeps en son royaume ». On dira au XIVe siècle : « le roi est empereur en son royaume ». La souveraineté donnait à l’autorité royale un fondement bien plus solide que la suzeraineté qu’elle tirait du droit féodal. A la souveraineté se rattachent les droits de puissance publique que le roi exerçait de par sa fonction. Les prérogatives principales de la souveraineté monarchique sont la justice et la législation. Il faut distinguer justice déléguée, justice rendue au nom du roi par les représentants du roi, et justice retenue, manifestation du pouvoir souverain du roi pouvant modifier les cours, dessaisir les tribunaux compétents au profit d‘autres juridictions voir juger lui-même. 

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