•       c)Le développement des coutumes

    le déclin des droits écrits a permis le règne incontesté de la coutume, aussi bien dans France du Midi que dans celle du Nord, domination qui a eu d’importantes conséquences sur la formation de notre droit. En dépit de son importance, le phénomène coutumier reste mal connu. Ce n’est qu’à partir du XIIIe siècle qu’ils se laissent mieux appréhender grâce à la rédaction des coutumiers.

          *Naissance des coutumes territoriales

    L’émergence des coutumes territoriales est généralement perçue comme la conséquence de la disparition conjuguée du droit romain et des droits barbares. Les juridictions féodales et seigneuriales auraient joué aussi leur rôle dans la fixation de ces règles, en les confirmant, éventuellement en les modifiant par leurs jugements, ce qui expliquerait que les ressorts des coutumes aient souvent épousé les limites des seigneuries. L’accomplissement de ce processus de formation de la coutume, inégalement précoce ou tardif selon les régions, aurait été dans l’ensemble assez lent.

          *Origine et contenu des règles coutumières

    Le processus de formation des coutumes, l’origine des règles qu’elles contiennent donne matière à débats. On a reconnu avec plus ou moins de certitude dans certaines d’entre elles des solutions venues du droit romain tardif, des lois barbares ou de la législation franque. Néanmoins la provenance des plus nombreuses et des plus importantes, dont la généralité plaide en faveur de l’ancienneté, est beaucoup plus incertaine et le droit coutumier apparait à bien des égards comme un système original, dont les caractères ne peuvent être rattachés à des précédents connus.

          *La connaissance et la preuve des coutumes

    Du fait du caractère oral des coutumes, leur connaissance et leur preuve en justice présentaient des difficultés. Jusqu’au début du XIIIe siècle, la connaissance des coutumes, qui tenaient encore dans des solutions simples et peu nombreuses, d’origine populaire, semble avoir été largement répandue et les actes de l’époque relatent peu de litiges portant directement sur leur teneur.

    A partir du XIIIe siècle, lorsque la coutume est devenue, sous l’influence des droits savants, un système juridique plus évolué mais aussi plus complexe et moins accessible à la masse de la population, s’est posée la question de son autorité et de sa preuve en justice. Le procédé de preuve le plus répandu était l’enquête. Pour pallier les inconvénients de l’oralité des coutumes, on a commencé, à la fin du XIIe siècle et au XIIIe siècle, à les rédiger. 


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  •       b)Déclin de la législation

    La législation a suivi la même pente. Au lendemain des invasions, les rois barbares, en héritiers des empereurs, ont maintenu une activité législative, d’abord dans le cadre de la rédaction des lois nationales de leurs peuples mais aussi pour édicter des lois autonomes sous la forme de capitulaires. A la fin de la période franque, la décomposition du pouvoir a fait disparaitre pour plusieurs siècles la législation royale des sources du droit.

          *Les lois nationales des barbares

    La rédaction des lois nationales des peuples barbares a été entreprise sur l’ordre de leurs rois peu après l’établissement en Gaule, en même temps que les compilations de lois romaines, et a donné matière à une législation importante. En fait, il apparait que ces textes, largement ouvert aux influences romaines, régissaient toute la population, au même titre que les lois romaines reprises par le Bréviaire d’Alaric ou le Papien. Ainsi du Code d’Euric (476) et de la loi Gombette (vers 502).

    Au contraire, les lois franques, qui n’avaient pas vocation à régir les gallo-romains, ont conservé plus fidèlement les traditions germaniques. La loi des francs saliens, ou Loi salique, rédigée en latin sous le règne de Clovis, fut révisé à plusieurs reprises, la dernière fois sous Charlemagne. Mise par écrit plus tardivement, au milieu du VIIe siècle, la loi des francs du Rhin, ou Loi ripuaire, a subi l’influence de la précédente. En dépit de cet effort de rédaction, elles sont tombées complétements en désuétude.

          *Les capitulaires

    La législation des rois francs s’est exprimée aussi sous la forme de capitulaires, lois divisées en chapitres, dont quelques-uns étaient pris pour compléter ou modifier une loi nationale, mais dont la plupart avaient une existence autonome. Les mérovingiens n’ont promulgué qu’un nombre réduit de lois. Les premiers carolingiens, inspirés par une forte volonté réformatrice, se sont montrés plus actifs dans des matières variées : l’administration et les affaires ecclésiastique, la répression des crimes et délits, plus rarement le droit privé.

    Emanés de l’autorité du roi, les capitulaires, depuis le VIe siècle, étaient discutés et approuvés au sein d’assemblées, les plaids généraux, qui réunissaient les grands laïcs et ecclésiastiques. Sous le règne de Charles le Chauve, lorsque s’est amorcé le déclin de l’autorité royale, certains ont revêtu l’aspect de véritables contrats passés entre eux et le roi. A la fin du IXe siècle, avec l’accentuation de ce déclin, la législation royale s’est raréfiée et a fini par disparaitre : l’ultime capitulaire carolingien date de 884. Avec elle s’est tarie la dernière source écrite du droit.


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  • II)Les sources du droit privé

    Plus encore que celles qui ont affecté le droit public, les transformations du droit privé sont révélatrices des vicissitudes subies par les sources juridiques. Le fait majeur est l’établissement d’une situation de pluralisme où coexistaient de nombreuses sources du droit, concurrentes ou complémentaires, et où le droit romain, sans jamais s’effacer complètement, ne constituait plus qu’une source parmi d’autres.

    Le pluralisme médiéval est né d’une double évolution historique. La plus ancienne, qui a prolongé et amplifié au cours des périodes franque et féodale les tendances apparues aux derniers siècles de l’Empire romain, a vu le déclin des formes savantes du droit et le retour à un droit oral et coutumier. La seconde, plus tardive, à partir du XIIe siècle, a été marquée à l’inverse par la renaissance des droits savants, droit romain mais aussi droit canonique, qui n’ont pas évincé les coutumes mais se sont juxtaposés à elles. 

       1)Prééminence du droit coutumier

          a)L’éclipse du droit romain

    Le droit romain a survécu aux invasions, qui n’ont altéré ni son autorité ni la connaissance et la compréhension déjà limitées qu’on en avait. La vigueur qu’il a conservée au Ve-VIe siècle est attestée par les compilations de lois romaines ordonnées par les rois barbares, à l’imitation des empereurs, ou dues à des initiatives privées, pour aider juges et praticiens à distinguer qu’il convenait de conserver et qui pouvaient être utilement invoquées en justice.

    Du royaume wisigoth proviennent deux grands textes officiels : l’Edit de Théodoric, loi de cent cinquante-quatre articles promulguée vers 460 sur ordre du roi Théodoric II (453-466), et un recueil plus important, la Loi romaines des wisigoths ou Bréviaire d’Alaric, que fit rédiger en 506 le roi Alaric II. Du royaume burgonde est issue une compilation unique de lois romaines, la Loi romaines de burgondes ou Papien, composée entre 502 et 516, vraisemblablement une œuvre privée.

    Au Xe et XIe siècles, terme de l’évolution, le droit romain, malgré les efforts des clercs pour en perpétuer le souvenir et l’enseignement dans les écoles épiscopales ou monastiques, a presque partout cessé d’exister en tant que système juridique écrit : dans les actes de la pratique n’en restent que des vestiges plus ou moins déformés, moins rare et moins mal compris dans le Midi et l’Ouest (Languedoc, Catalogne, région toulousaine, Auvergne, Poitou), mais qui n’ont subsisté qu’en passant à l’état de coutumes.


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